Quand Bamako invite Amsterdam
En 2022 Seydou Camara, le photographe professionnel malien rencontre Jan Dirk van der Burg à Amsterdam. Ils échangent leurs clichés, chacun donne de la valeur au travail artistique de l’autre. Ce qui donnera naissance à une initiative de séjour de Jan au Mali pour un atelier d’échange interculturel à travers un Workshop de la photographie. Ce Workshop a été un cadre idéal de professionnaliser 12 photographes maliens dans la photographie d’art.
A Bamako on apprécie les photos que pendant les grands évènements et cérémonies familiales. Un photographe professionnel ne sonne rien d’optimiste dans cette société largement immergée dans les photos des Smartphones. Alors que la ville de trois Caïmans, Bamako est une plaque incontournable de la photographie mondiale à travers les Rencontres de Bamako, un évènement qui se déroule chaque deux ans autour de la photo. Au vu de ce constat déplorable profondément partagé par les animateurs de ce métier qui est en constance évolution dans le monde. Un collectif des photographes réuni au sein de YAMAROUPHOTO est né pour porter un autre regard sur la photographie malienne au niveau international.
« Nous voulons redonner au pays sa renommée d’antan sur la scène de la photographie mondiale. C’est pour nous une reconnaissance historique aux travaux remarquables faits par les pionniers de la photo au Mali, dont les œuvres continuent de faire le tour du monde » indique Seydou Camara, Directeur Artistique de Yamarouphoto.

Un workshop de spécialisation en photographie d’art de standard international
Ce workshop est mis en œuvre à travers le projet « Entre fragilité et rigidité » de Yamarouphoto, une initiative communautaire, appuyé par la Strichting Doen. Cet atelier de perfectionnement en photographie artistique qui est officiellement lancé ce 21 juillet au siège de Yamarouphoto à Sotuba dans la capitale malienne, est dirigé par un expert hollandais en photographie, Jan Dirk van der Burg.

A travers un appel à candidature 12 photographes professionnels et amateurs maliens ont été sélectionnes pour suivre cette formation. Elle visait à perfectionner des participants aux nouvelles techniques de la photographie contemporaine. Le but de cette formation aux dits des initiateurs est de rehausser le niveau des bénéficiaires face à la révolution rapide des techniques de la photographie.

« L’idée de cette formation est née d’un constat. Nous vivons à une époque où la photographie est en constance évolution grâce notamment aux nouvelles technologies. Nous avons jugé nécessaire d’organiser des formations qui permettront de mettre les photographes maliens à niveau pour s’adapter aux nouvelles techniques du monde numérique » a précisé Seydou Camara Directeur Artistique de Yamarouphoto. Il indique également qu’un accent particulier est mis sur la photographie d’art qui demeure presqu’un nouvel angle dans la photographie malienne domptée par la photo évènementielle.

La photographie d’art est la possibilité, pour un artiste (photographe), de communiquer en explorant son potentiel créatif. Elle peut se matérialiser par des paysages, portraits, natures mortes ou images abstraites. Selon les spécialistes de ce style de la photographie qui se différencie du photojournalisme, avant de se lancer dans la photographie d’art, il est important d’écouter les conseils de professionnels et de s’intéresser aux réalisations du genre.

La restitution des travaux des 12 participants
Pour le cas malien, Jan n’a pas voulu imposer de thème ni une quelconque procédure classique d’apprentissage aux participants. Chacun aura la liberté de développer son propre sujet et sera assisté par le formateur dans sa démarche à travers des techniques modernes de l’art photographique.

Jan Dirk dira lui-même qu’il est venu à Bamako pour partager son expérience avec ses collègues maliens. « Je ne suis pas là pour leur apprendre les techniques de base de la photographie parce que je sais déjà que chacun d’entre eux a ces notions. Je suis là pour donner des astuces pour la lecture, la critique et l’analyse d’une image » indique-t-il.

Huit femmes et quatre hommes qui ont participé à ce workshop, ont fait la restitution de leurs travaux au grand public après dix jours de travail. Cet atelier a permis aux douze participants de réaliser des créations extraordinaires, facilité par l’expert en photographie Jan Dirk van Burg surnommé Yiriba Diarra, un nom malien. Des histoires émouvantes sont racontées, des critiques et analyses inspirantes ont été faites à travers la photographie contemporaine.

L’une des participantes, Fatouma Harber, Bloggeuse, lâche le déclic sur des déchets dans la capitale malienne. Son cliché d’une montagne de déchet à proximité d’un hôtel en pleine ville, est une critique photographique sur la prise en charge des déchets à Bamako.

Kani Sissoko parlera de l’intimité à travers le « Baaya » une perle que les femmes maliennes portent sur les hanches. Cette perle est symbolique, ne doit être vu que par le mari de la femme dans leur chambre d’intimité dans la nuit profonde. L’enfant qu’elle était, Kani, ne portait aucune attention sinon ne savait rien de cette tradition autour de cette jolie perle brillante qu’elle portait et jubilait à n’importe qui. Elle a été traitée de tous les noms. Une inspiration tirée de cette histoire, d’où elle fait un cliché avec les perles sur la tête de dire qu’elle n’a rien à voir avec ces histoires autour du « Baaya ».

Pour sa part, Alfouseyni Konaté porte ses yeux sur les « morts », ce ne sont pas des morts inertes que nous connaissons mais ceux qui nourrissent les vivants. Cette histoire est inspirée des faits réels dans la société malienne, des chefs de familles après leurs décès, leurs progénitures ne font plus rien. Ils vivent de l’héritage légué, ou plus souvent la famille se détruit au profit de ces biens matériels laissés par les parents.

D’autres se sont exprimés à travers la photographie d’art sur l’excision, la discrimination faite aux femmes dans les espaces de travail, des travaux de forgerons ont été étalés, le grand marché des friperies de Bamako a été photographié artistiquement avec ces délicieuses histoires derrière.

Mieux, une autre a dévoilé l’amour inconditionnel qui régnait entre elle et sa défunte maman, avec des émotions éblouissantes derrière.

Haidara a fait un bond dans la tanière pitoyable des étudiantes qui quittent l’intérieur du pays pour venir étudier dans la grande ville. A cause de la difficulté liée à leurs conditions de vie, elles sont souvent contraintes à devenir des filles de joie nuitamment pour essayer de sourire.

La place du henné dans la société malienne ainsi que la vie des tailleurs faisaient aussi partie de cette exposition des participants du Workshop international Yamarouphoto.


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